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Principes et définitions

MALENTENDUS ÉQUESTRES

Tout un chacun a en mémoire le jeu qui consiste à énoncer une phrase, puis à demander à une personne de la répéter à une troisième personne et ainsi de suite… A la fin, la phrase prononcée n’a souvent que peu de rapport avec la phrase d’origine.

À une époque où l'on ne prend plus suffisamment le temps d’expliquer ce que cachent nombre de termes utilisés en équitation, les conseils donnés, écrits ou transmis d’un enseignant à un autre, ou d’un enseignant à un élève, ne sont pas toujours compris comme ils devraient l’être et peuvent même devenir totalement faux. Il en résulte de nombreux malentendus, tant au niveau de la pratique équestre courante que dans l'évolution actuelle du dressage.

Ces malentendus peuvent concerner la position du cavalier, et, partant, l'efficacité de l'équitation. Ils peuvent aussi concerner l'attitude que doit avoir le cheval au travail.

"Descendre les talons"

Avoir les talons "bas" est un conseil que tout cavalier a nécessairement entendu un jour ou l’autre. À l’origine, cette indication avait pour but d’inviter le cavalier à avoir une jambe décontractée. Et l’étrivière étant plus courte que la jambe décontractée, il était normal que le talon soit, de par le poids de la jambe et le poser du bout du pied sur l’étrier, légèrement en dessous de l’horizontale. Cette position de la cheville autorise aussi le jeu des articulations inférieures pour amortir les réactions du cheval et avoir une jambe fixe (nous y reviendrons).

Le talon exagérément descendu fait mettre trop de poids sur l'étrier : la jambe a tendance à filer vers l'avant.

Or, bien souvent, qu’entend on ? Des moniteurs qui demandent à leurs cavaliers d’avoir la cheville totalement fermée et le talon trop bas, pointe de pied exagérément remontée.

«Coller le mollet dans l’espoir d’avoir la jambe fixe est le meilleur moyen pour avoir un cheval lourd à la jambe»

Cette position du bas de la jambe entraîne immanquablement une contraction de la cheville (adieu souplesse et liant de la jambe), un appui trop grand sur l’étrier (manque d’équilibre du cavalier) et une jambe qui souvent part vers l’avant (finie l’utilisation de la jambe en tant que déclencheur d’une impulsion bien comprise).

"La jambe fixe"

Il est vrai qu’en équitation, la jambe doit être fixe. Hors cela, aucune finesse de cette aide, aucune légèreté du cheval dans le mouvement en avant. Et pour respecter cette consigne, il n’est pas rare d’entendre le conseil de coller son mollet contre le flanc du cheval. Conseil totalement contraire à une juste compréhension du dialogue cavalier/cheval. L’équitation est mouvement et tout du cheval et du cavalier doit bouger, mais bouger de concert… Le cavalier se doit d’être lié aux mouvements de son cheval. Il doit avoir les articulations souples et il doit être décontracté pour ne pas être une gêne sur le dos de son cheval ; il le doit pour être précis et rigoureux dans ses demandes.

Genou très collé : le cavalier va manquer de liant, et avoit tendance à se pencher en avant.

Il est donc tout à fait normal que la jambe puisse bouger, dans un plan vertical quand elle se doit d’être neutre, dans différentes positions selon le but que l’on veut donner à son action. Une jambe qui bouge n’est pas nécessairement le résultat d’un manque de fixité et de coordination. Ce peut être une preuve de liant. Et coller le mollet dans l’espoir d’avoir la jambe fixe est le meilleur moyen pour avoir un cheval lourd à la jambe…

"Ne pas serrer le genou"

Voici un autre conseil fréquemment entendu dans un manège... et avec raison. Car un genou serré est une articulation bloquée, ce qui empêche la descente de la jambe, le liant et la souplesse du cavalier. Beaucoup pensent aussi qu’un genou serré, surtout en suspension, est un risque de perte d’équilibre vers l’avant.

Genou ouvert : la cheville a tendance à basculer, la cuisse a tendance à s'écarter aussi.

Et pour contrecarrer cela, l’enseignant invite le cavalier à écarter le genou de la selle… Très mauvais conseil ! Car écarter le genou, c’est coller le mollet avec les inconvénients cités plus haut. Car, c’est aussi écarter la cuisse avec la perte de liant et d’équilibre qui en découle ; "l’appui sur les cuisses" est une réalité en équitation. Et écarter le genou, c’est aussi le bloquer et empêcher son jeu d’articulation amortissante dans le plan vertical.

Les quelques exemples qui précédent se rapportent au cavalier et les conseils qui en découlent sont donc néfastes à une bonne pratique équestre : manque de liant, fixité hasardeuse, aides manquant de précision. Les exemples de conseils mal donnés sont aussi fréquents en ce qui concerne l’éducation des chevaux. Mais les dommages sont encore plus grands pour le physique et le moral du cheval, celui-ci étant bien souvent atteint alors dans son intégrité physique. Pour ce qui est du cheval, les termes mal expliqués et mal compris sont essentiellement ceux qui concernent l’attitude du bout de devant. Et l’erreur la plus grave dans la transmission orale de ces notions vient du manque d’explications et de consignes. La principale consigne généralement omise est celle qui préconise que c’est le cheval qui doit tendre ses rênes et non le cavalier qui doit tirer la bouche du cheval à lui.

Mettre un cheval "sur la main"

Ainsi mettre un cheval sur la main ne veut aucunement dire qu’il faille raccourcir ses rênes jusqu’à un contact, souvent trop important. Lorsque, de manière classique, on demande à un cavalier de mettre son cheval sur la main, c’est l’inviter à mettre en œuvre toute une série d’exercices de gymnastique visant à ce que le cheval s’étende pour venir se poser sur le mors et prendre contact par l’intermédiaire du mors et des rênes avec les mains et les épaules du cavalier.

Mettre un cheval "en main"

Mettre un cheval en main est de la même veine ; il s’agit non pas de tirer la tête du cheval à soi, mais de l’inviter une fois sur la main à se décontracter dans sa nuque et dans sa bouche (fermeture de l’angle de la nuque et mouvement lent et souple de la langue qui joue avec le mors).

"Ramener" le cheval

"Ramener le cheval" : encore un terme qui, mal expliqué, est souvent mal compris. Le ramener consiste en un début d’élévation de l’encolure sur un cheval mis en main.

Certains cavaliers illustrent hélas au plus haut niveau l'équitation "d'avant en arrière" si fréquente aujourd'hui en compétition de dressage : on voit encore trop souvent des postérieurs qui ne sont pas engagés, des chevaux ramenés sur des rênes très tendues (branche du mors de bride pratiquement horizontale).

Nous avons là l’exemple de termes très dangereux pour le physique du cheval, à une époque où on ne prend plus suffisamment le temps d’expliquer ce que cachent nombre de termes utilisés en équitation. Car bien souvent alors, le choix des mots implique la notion de tirer à soi. Il en est de même lorsque l’on conseille à un cavalier de tendre ses rênes. Par le passé, quand on donnait l’ordre au cavalier de tendre ses rênes, ce dernier savait qu’il devait mettre alors en œuvre des exercices invitant le cheval à s’étendre pour se tendre sur des rênes au contact. Aujourd‘hui un cavalier auquel on demande de tendre ses rênes, bien souvent, les raccourcit jusqu’à une longueur ne correspondant aucunement à l’attitude recherchée chez le cheval. Ce qui souvent, mal encadré, aboutit au rollkur et aux chevaux nez dans le poitrail, dos creux et postérieurs loin derrière.

«Le plus souvent, une bouche dure résulte de défauts d’équilibre du cheval»

Ces conseils, mal expliqués, mal mis en pratique, amènent souvent les cavaliers à se plaindre de la mauvaise qualité de la bouche des chevaux. Or, la souplesse de la bouche des chevaux résulte uniquement de la souplesse de la main du cavalier. Il n’existe pratiquement pas de chevaux à la bouche dure. Il y a des chevaux qui ont une bouche plus ou moins sensible, plus ou moins fine, plus ou moins facile. Le plus souvent, une bouche dure résulte de défauts d’équilibre du cheval et surtout de bouches abîmées par des cavaliers maladroits. Et cette équitation pratiquée "d’avant en arrière", qui s’intéresse beaucoup plus à l’attitude du bout de devant qu’au fonctionnement du moteur que sont les postérieurs et le dos du cheval, est souvent à l’origine de contractions, de résistances, qui nuisent au mouvement naturel du cheval sous la selle. Savoir comment se mobilise un cheval, comprendre les attitudes que l’on cherche à lui faire prendre en fonction de son degré d’éducation pour le rendre plus léger et maniable sous la selle, connaître l’utilité gymnastique de ce que l’on nomme les figures de manège sont autant de pré-requis qui permettront une équitation "d’arrière en avant", plus respectueuse du cheval.

 

Yves KATZ, 2014.